Clam Chow quoi?
« If you’re goiiiiiing to San Francisco, be sure to eeeeeat a claaaaam chowder…» OK, pour la sérénade, je repasserais mais pour ce qui est de la cuisine, autant te dire que je me suis régalée à Beatnik City : des dim sums à se damner, débordant de gingembre frais, de crevettes et de feuilles de liseron d’eau (le Chinatown du cru est la plus grande ville chinoise hors de Chine, tu vois le topo ?), des plats végétariens particulièrement raffinés (loin des gloubiboulgas insipides au tofu servis dans les QG bio de Paris) et, et, et des crustacés… San Francisco est aussi célèbre pour son pain au levain (sourdough bread) que les locaux sont persuadés d’avoir inventé ( !) et qu’ils achètent au terme d’une longue attente en file indienne devant des boulangeries appelées « Boudin » (cherche pas…) que pour ses deux soupes de poissons et de crustacés : le Cioppino et, donc, le Clam chowder...
On pourrait (qu’Allen Ginsberg, Jack Kerouak et William Burroughs me pardonnent depuis leurs paradis que j’espère au final pas si artificiels que ça) comparer la première à une copie de ta bouillabaisse : de l’ail, du vin blanc, plein de poissons et de coquillages différents dedans (des moules aux saint-jacques en passant par les crevettes et le Dungeness Crab, autre spécialité de la Bay Area).
Son invention remonte à l’entre-deux guerres quand le port de San Francisco se remplissait d’immigrés italiens. Au retour de la pêche, tous les marins étaient appelés à verser (« chip in ») une partie de leur butin dans la soupe populaire ce qui, le chianti aidant, a fini par devenir Cioppino. Ta serviteuse a testé et approuvé mais, malgré le souci de transparence qui l’anime, ne publiera pas les photos de la dégustation : on t’impose une grande serviette en plastique avec des homards imprimés dessus, tenue passible de la peine de mort dans un pays qui a inventé Yves Saint-Laurent…
Toujours plus haut, toujours plus fort : le Clam chowder (la « chaudrée de palourdes » en françois bondiou !) ou comment faire une soupe avec (presque) juste de la crème, un peu de lard et des crustacés (additionnés d’une pincée de pommes de terre…) Ouh je te vois venir, toi la East Coaster d’adoption : « Mais euh, le Clam chowder, ça vient de Nouvelle Angleterre d’abord euh…». Ouai mais ces saints Franciscains ont allié deux de leurs spécialités pour faire un plat unique : la soupe aux palourdes servies dans des boules de pains au levain… Tada ! C’est beau et délicieux (comme nous…): l’acidité du pain se marie avec la douceur du bouillon qui n’en est pas un ! A déguster en regardant le brouillard se lever sur le Golden Gate Bridge…
PS : Il y a autant de recettes que de cuisinières alors j’ai calqué la mienne sur une valeur sûre : ta copine Martha Stewart, grande prêtresse du culinairement correct aux States…
La recette – Pour quatre personnes – Dix minutes de préparation, trente de cuisson - Facile mais un peu cher (les palourdes, ça court pas les rues de Belleville…)
Six fines tranches de bacon fumé, deux petites branches de céleri, coupées en petits cubes, un gros oignon émincé en petits cubes
Une cuillère à soupe de tabasco, une autre de Worcestershire Sauce et un petit verre de vin blanc
½ litre de fumet de poisson ou de bouillon de crustacés (Merci Mr Robuchon chez Monop’)
Quatre pommes de terre moyennes, fermes
Trois cuillères à soupe de farine
Deux feuilles de laurier, du poivre noir, du thym frais
800 grammes de chair de palourdes (là, il vaut mieux être copine avec le poissonnier parce que c’est du boulot : faut les ouvrir, les décrocher de leurs coquilles sans perdre le jus… tricky…) Il te faudra aussi couper le tout en morceaux
Une petite boîte de maïs en grain
½ litre de lait et 250 ml de crème fraîche (oui, oui, tu as bien lu)
Tu prends une grande cocotte et tu mets le feu. Tu fais revenir le bacon jusqu’à ce qu’il croustille et tu réserves les tranches à part. Dans ce gras de lard (faut appeler un chat un chat) tu fais revenir le céleri et l’oignon jusqu’à ce qu’ils soient translucides, genre six-sept minutes. Tu ajoutes la farine et tu mélanges pour bien la répartir, tu fais cuire deux minutes et puis tu verses le vin blanc et tu laisses évaporer un peu. Tu ajoutes le tabasco et la Worceshshshaïre.
Tu verses le fumet de poissons, 10 centilitres d’eau, les feuilles de laurier, les pommes de terre. Tu poivres mais tu sales pas (venant de moi, ça peut surprendre mais crois-moi, le sel est totalement superfétatoire là). Tu chauffes Marcel jusqu’à ce que ça bout. Tu ajoutes le thym, tu réduis le feu et tu fais mijoter 15 minutes (ou jusqu’à ce que les pommes de terre soient moelleuses)
Vient le moment de jeter les palourdes à la baille (accompagnées de leur jus). Le mélange cuit cinq minutes avant d’être rejoint par le maïs, cinq minutes encore, et hop, le lait et la crème et là ATTENTION il ne faut jamais que cela bout… Tu cuis encore cinq minutes.
Pour servir, tu peux jouer aux parfaites maîtresses de maison californiennes et creuser des petits pains ronds au levain mais un bon vieux bol fera l’affaire. Tu saupoudres de bacon bits et de feuilles de thym et « voilaaa » comme disent tes compatriotes !